Sami Aldeeb: La Palestine et le nazisme juif – Episode 3

C’est le troisième épisode de la série d’articles intitulés La Palestine et le nazisme juif, publiés en arabe et en français, enregistrés sur ma chaîne youtube https://www.youtube.com/user/samialdeeb/videos. Les articles en langue arabe sont publiés sur ma page dans le forum arabe http://www.ahewar.org/m.asp?i=5388

Je répète ici que la notion de nazisme juif n’est pas de moi. Elle est empruntée au philosophe israélien Yeshayahu Leibowitz, Professeur de l’Université hébraïque de Jérusalem, décédé en 1994, opposant de la politique d’Israël, qu’il décrit comme étant un régime judéo-nazi.

Nous parlerons aujourd’hui de l’expulsion des non-juifs et la destruction des localités palestiniennes. Ces deux pratiques font d’Israël, qui se définit comme État juif,  un régime judéo-nazi. 

Expulsions et Destructions après 1948

1) Expulsions des non-juifs

Ben-Gurion, un des fondateurs et premier Premier Ministre d’Israël, déclarait en 1937 que la Palestine n’appartenait pas à ses habitants d’alors, et que ce pays devait résoudre non pas le problème de deux nations, mais d’une seule nation, les juifs de partout.

Cette déclaration de Ben-Gurion s’inscrit dans la ligne du programme du mouvement sioniste fondé par Theodor Herzl en 1896, qui visait à faire de la Palestine une patrie pour les seuls juifs. La mise en exécution de ce programme a été l’oeuvre de groupes terroristes israéliens dont le Stern et l’Irgoun.

Pendant de longues années, le gouvernement israélien prétendait que les palestiniens avaient quitté leur pays sur appel des dirigeants arabes. Erskine Childers, un journaliste anglais, a été le premier en Occident à démystifier cette falsification historique. Il a auditionné la totalité des émissions radiophoniques diffusées au Proche-Orient à l’époque. Il a démontré que les seules émissions incitant la population palestinienne à partir sont d’origine sioniste. Ces émissions développaient de façon volontairement menaçante les thèmes de l’extermination à laquelle étaient promis ceux qui restaient en Palestine. Des historiens israéliens (Flapan, Morris, etc.) ont confirmé par la suite que ce sont bel et bien les forces armées sionistes qui ont provoqué le départ des palestiniens.

Cette guerre psychologique était accompagnée de massacres réels, dont le plus connu est celui de Dair Yassin conté par un Suisse, Jacques de Reynier, Président de la Délégation de la Croix Rouge Internationale en 1948. Il écrit: « Il y avait 400 personnes dans ce village, une cinquantaine se sont enfuies, trois sont encore vivantes. Tout le reste a été massacré sciemment, volontairement, car je l’ai constaté, cette troupe est admirablement en main et elle n’agit que sur ordre ». Ce massacre, qui a coûté la vie à environ 350 civils, composés en majorité d’enfants, de femmes et de vieillards, a été perpétré par l’Irgoun (dirigé par l’ancien Premier Ministre Menahem Bégin, Prix Nobel de la paix) et par le Lehi (dirigé par Yitzhak Shamir, devenu Premier Ministre).

Le cas de Dair Yassin n’était pas un cas isolé. Mais les informations sont publiées au compte-goutte. Le journal israélien Davar a révélé seulement le 6 septembre 1979 des massacres similaires perpétrés en 1948 dans le village Al-Duwayma qui comptait 2’700 habitants.

Une déclaration de Menahem Bégin aux Etats-Unis en été 1948 indique comment les choses se sont passées:

Dans le mois précédant la fin du mandat, l’Agence juive décida d’entreprendre une mission difficile, celle de faire sortir les arabes des villes avant l’évacuation des troupes britanniques … l’Agence juive en vint à un accord avec nous (Irgoun) pour que nous exécutions ces arrangements, tandis qu’elle répudierait tout ce que nous ferions et prétendrait que nous étions des éléments dissidents, comme elle le faisait quand nous combattions les britanniques. Alors nous avons frappé avec force et mis la terreur dans le coeur des arabes. Ainsi nous avons accompli l’expulsion de la population arabe des régions assignées à l’Etat juif.

L’expulsion des non-juifs s’est poursuivie même après la signature de l’accord d’armistice avec les pays arabes voisins. Ces expulsions s’effectuaient soit d’une région à l’autre à l’intérieur d’Israël, soit d’Israël vers un pays arabe voisin.

Par ces mesures, l’Etat d’Israël a vidé le pays de trois quarts de ses habitants non-juifs qui sont pourtant considérés par le plan de partage de l’ONU de 1947 comme citoyens de l’Etat juif. Ils sont maintenant en partie dans 61 camps de réfugiés, dont 28 camps dans les territoires occupés par Israël en 1967.

Ce qui s’est passé en Palestine est résumé d’une manière sans équivoque par Shimon Pérès dans un article paru dans le Monde le 23 septembre 1988: « Voici cent ans, le mouvement sioniste s’est consacré à la réalisation d’une majorité juive dans un seul pays, le pays du peuple juif. L’Etat juif, cela signifie un Etat où les juifs sont une majorité claire ».

2) Destruction des localités des non-juifs

Dans un document distribué en Suisse en septembre 1987 pour récolter 6’000’000 Sfr. en faveur d’une Forêt suisse à planter dans la région de Tibériade, le Fonds national juif remercie d’avance ses bienfaiteurs dont le soutien « permettra de transformer un sol désertique en une verte contrée ». Ceci fait partie d’une propagande largement orchestrée pour faire croire que la Palestine est un pays désert, fleuri par Israël. Cet organisme cependant ne dit pas que ces forêts se trouvent souvent sur l’emplacement de villages palestiniens détruits.

En fait, l’Etat d’Israël, après l’expulsion des palestiniens, a détruit la plupart de leurs villages et a planté sur leur emplacement des forêts pour effacer leurs traces. Les terres agricoles ont été attribuées à des kibboutz et à des moshav habités exclusivement de juifs. Le professeur Israel Shahak de l’Université hébraïque de Jérusalem écrit à ce propos:

La vérité sur  les populations arabes, telles qu’elles existaient sur le territoire de l’Etat d’Israël avant 1948, est l’un des secrets les mieux gardés de la vie israélienne. Aucune publication, aucun livre ou brochure qui donne leur nom, ou leur emplacement. Ce silence, bien sûr, a pour but l’authentification du mythe, accepté officiellement, d’un pays désert. Ce mythe est enseigné et admis dans les écoles israéliennes, et répété aux visiteurs. Une telle falsification des faits est une des plus graves infractions à la loi morale et l’un des obstacles les plus importants contre toute possibilité de paix. Une paix qui ne soit basée ni sur la force, ni sur l’oppression. Cette falsification est, à mon avis, d’autant plus grave qu’elle est presque universellement admise hors du Moyen-Orient. Etant donné que les villages arabes furent presque détruits complètement avec leurs maisons, leurs clôtures, et même leurs cimetières et leurs tombeaux, pas une pierre n’étant restée visible, les visiteurs peuvent accepter l’idée qu’il n’y avait là qu’un désert.

La liste établie par Israel Shahak et vérifiée par Christoph Uehlinger comprend 383 villages palestiniens détruits repartis comme suit:

District de Jérusalem               37                   District de Safad                  76

District de Béershéba               1                     District de Hébron               15

District de Ramle                     54                   District de Gaza                   45

District de Tulkarem                10                   District de Jaffa                    19

District d’Acre                          25                   District de Haïfa                   45

District de Jenin                        6                     District de Nazareth            4

District de Tibériade                24                   District de Beisan                22

Ceci représente environ 81% de l’ensemble des localités palestiniennes qui existaient dans les frontières avant 1967. A ces villages, il faut ajouter un très grand nombre de tribus expulsées ou massacrées et dont la liste est reproduite par le Professeur Shahak. Ajoutons aussi que les non-juifs de villes comme Tibériade, Safad, Majdal (Ashqelon), Isdud (Ashdod), Béershéba ont été presque entièrement expulsés. A Lod, Ramle, Jaffa, Haïfa et Acre, les non-juifs ont été en grande majorité expulsés; ceux qui y sont restés ont été logés par force dans des ghettos.

Le cas de Biram, un village chrétien au nord d’Israël est significatif. En 1948, raconte le Père Chacour, un prêtre mélkite originaire de Biram, les habitants de ce village recevaient les juifs qui venaient d’arriver pour leur montrer qu’il y avait quelque part dans ce monde des gens prêts à les recevoir généreusement après les persécutions nazis. Les soldats israéliens ont alors ordonné aux pères de famille de ramasser les clés des maisons, de les leur livrer et de partir pour deux semaines. Les habitants de Biram ont dormi dans les cavernes, dans des grottes, sous les oliviers pendant deux semaines. Après quoi, les pères de famille et les hommes adultes sont allés voir les soldats pour pouvoir retourner, car ils avaient de l’armée une promesse écrite qu’ils seraient autorisés à rentrer dans leurs maisons après deux semaines.

Mais ils ne sont jamais revenus. Ils ont été amenés dans des camions militaires jusqu’aux frontières d’Israël et ils ont été expulsés. Ils sont partis de Naplouse à Amman, à Damas, à Beyrouth, comme des centaines de milliers d’autres palestiniens. Certains ont quand même pu secrètement s’infiltrer à travers les frontières nord du nouvel Etat d’Israël pour rejoindre leurs femmes et leurs enfants. Les autres sont devenus des réfugiés.

Les gens de Biram continuent à demander le droit de retourner chez eux. Ils ont obtenu gain de cause devant les tribunaux israéliens. Mais pour les persuader qu’il n’y avait aucun espoir de retour, Ben-Gurion a ordonné la destruction du village le 16 septembre 1953. En 1987, quarante ans après l’expulsion des habitants, le groupe du rabbin Meir Kahane s’y est rendu, sous garde policière, pour effacer les croix sculptées dans la pierre des maisons déjà en ruine afin d’éliminer tous les signes chrétiens. Au mois de septembre de la même année, ils sont retournés détruire ce qui restait de l’école et endommager une partie de l’église. Ils ont ouvert la tombe du prêtre mort depuis huit mois et enterré à l’église; ils ont détruit sa tombe. Aucune sanction n’a été prise par le gouvernement israélien contre ces agissements.

Il va sans dire que non seulement les localités ont disparu, mais aussi les lieux de culte non-juifs. Ceux qui restaient ont été profanés parfois. Ainsi, une église orthodoxe d’Aïn Karim, le lieu de la Visitation, a été transformée en toilettes publiques; la mosquée de Safad en galerie d’art; celles de Césarée et d’Aïn Hud en restaurant et en bar; celle de Béershéba en musée; l’hôtel Hilton de Tel-Aviv, l’hôtel Plaza à Jérusalem et les parcs adjacents se trouvent sur des cimetières musulmans.

La destruction des villages palestiniens par Israël n’a pas encore pris fin. Il existe 122 villages palestiniens, regroupant 44’000 habitants, qui ne sont pas reconnus par Israël. Ce sont des villages auxquels les autorités israéliennes ne fournissent ni eau, ni électricité, ni services médicaux. Ils sont menacés de démolition et d’évacuation par Israël afin de pouvoir construire de nouvelles maisons pour les immigrants juifs.

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Sami Aldeeb, dr en droit
Directeur du Centre de droit arabe et islamique https://www.sami-aldeeb.com
Mes ouvrages: https://sami-aldeeb.com/livres-books

Liste des localités palestiniennes détruites par Israël et dont les habitants ont été chassés pour le seul crime qu’ils ne sont pas juifs: https://goo.gl/7kfiWK

Discriminations contre les non-juifs en Israël: https://goo.gl/cDZ2Z4

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